CAN 2019 : Les enjeux du deuxième trophée algérien

La victoire des Fennecs le 19 juillet a été un moment de célébration du football algérien mais aussi une cause devenue culturelle et politique.

Les joueurs célèbre la victoire avec la coupe, capture d'écran, juillet 2019

Les joueurs célèbre la victoire avec la coupe, capture d’écran, juillet 2019

Le coup de sifflet final du face à face Sénégal-Algérie a retenti jusque dans les villages les plus reculés d’Algérie. Toute la population est sortie pour célébrer la fin du sevrage de titre continental, qui a duré 29 ans. Au-delà de la joie visible, la célébration de la deuxième CAN algérienne était aussi au cœur d’une bataille politique.

Le pays connait depuis le mois d’avril un mouvement de contestation du régime qui a conduit au départ du président Bouteflika. Et depuis lors le mouvement d’humeur du peuple ne faiblit pas. Il réclame une élection présidentielle régulière. La légitimité du président intérimaire Abdelkader Bensalah est également mise à mal. Des milliers de manifestants sortent dans les rues chaque vendredi pour demander un scrutin libre.

La Coupe d’Afrique des Nations intervient pour ce dernier comme une occasion de faire monter sa cote de popularité auprès de la population. Pour la finale de la compétition, le gouvernement à mis en place un accompagnement des supporters désirant aller en Egypte. Des avions de l’armée ont été affrétés pour les transporter. Des billets pour le match leurs ont aussi été offerts.

Toutes ces attentions découlent de l’importance de l’équipe nationale de football dans l’histoire de l’Algérie. Cette sélection naît en 1958, en pleine guerre, et devient un symbole d’union du peuple. Ce symbole l’a encore été en 2019 quand les joueurs ont dédié cette victoire à tout le peuple algérien. Leurs frères qui luttent depuis 21 vendredi de mobilisation pour instaurer un gouvernement plus respectueux des aspirations populaires.

Une nation qui veut plus d’égalité et de transparence dans les affaires de l’Etat. En Algérie, les moins de 25 ans représentent 45% de la population selon des statistiques nationales. Des jeunes qui n’ont connu que le règne de Boutéflika qui arrive au pouvoir en 1990. La soif du changement a produit en eux une détermination qui crie à une deuxième république. Mais le temps de la finale et des émulations festives, les problèmes politiques prennent fin.

Un mouvement à forte teneur jeune également de l’autre côté de la Méditerranée. Les Algériens de France sont descendus en masse dans les rues. Les champs Elysée étaient noir de monde. On pouvait entendre dans les bruits de la foule « un, deux, trois ! Vive l’Algérie ». Au port de Marseille on pouvait aussi observer la même effervescence. Plus de 25 000 Algériens s’y sont retrouvés pour chanter le triomphe de leur pays. Cette ville, qui est réputé pour avoir la plus grande communauté d’Algériens de France, a vibré jusqu’au petit matin aux sons des chants des supporteurs des Fennecs.

supporteurs en liesse à Paris, Eurosport, juillet 2019

      supporteurs en liesse à Paris, Eurosport, juillet 2019

Le samedi 20 juillet, jour de retour de l’équipe nationale, Les Algériens impatients sont sortis dans les rues dès l’annonce de l’arrivée des joueurs à l’aéroport d’Alger. Même entouré de motards et de voitures de la gendarmerie, le cortège des champions d’Afrique a mis 5 heures pour arriver au Palais du peuple. La vingtaine de kilomètres qui sépare les deux lieux était inondé de monde. Une marée humaine qui ne voulait qu’apercevoir ces héros du peuple. Des défenseurs des couleurs nationales qui ont été porté ont reçu la médaille du mérite de la part du président Bensalah.

les supporters venus accueillir leurs héros, capture d'écran, juillet 2019

Le peuple algérien venu accueillir les « héros » de la CAN, capture d’écran, juillet 2019

La victoire du 19 juillet a ainsi permis la symbiose des Algériens du continent et ceux d’outre-Atlantique. La sélection nationale a contribué à fédérer autour du ballon rond les forces populaires et les dirigeants du pays pour surpasser les tensions politiques. Ce nouveau souffle du football algérien devient ainsi un facteur important de l’unité nationale algérienne.

Laisser un commentaire