Le chanteur est devenu célèbre dans le monde entier grâce à sa musique originale, mêlant des sonorités zoulou à de la pop occidentale, mais aussi pour ses prises de position contre l’Apartheid.
- Johnny Clegg danse lors une cérémonie traditionnelle zoulou , La Croix, fin années 80
Sa chanson la plus engagée et la plus connue de nos jours est « Asimbonanga », dédiée à Nelson Mandela. Composée au plus fort de la ségrégation raciale, quand Mandela était encore en prison, la mélodie et les paroles sont un mélange de Zoulou et de pop qui invite le peuple sudafricain à dépasser ses différences pigmentaires.
La culture zoulou, Johny Clegg en tombe amoureux dès son arrivée en Afrique du sud, quand il est âgé de 7 ans. Il est surtout fasciné par la manière si énergique de danser de ce peuple qu’à l’âge de 15 ans il brave les interdits et commence à fréquenter des foyers zoulou. Il est obligé de se cacher pour aller voir ses nouveaux amis car le régime de l’Apartheid défend la fréquentation des personnes blanches par les noires et vis versa.
Sa passion grandissante pour cette culture le pousse à participer aux prestations de certains groupes de danse. Il apprend très vite les chorégraphies acrobatiques et en devient fan. A 17 ans seulement il fonde le groupe Juluka et commence à associer le mbanqanga, une musique zoulou, aux accords des instruments modernes. « Nous devions faire preuve de mille et une astuces pour contourner la myriade de lois qui empêchaient tout rapprochement interracial », racontait-il à l’AFP en 2017.
Avec son groupe, il compose plusieurs chansons, dont Asimbonanga qui signifie « Nous ne l’avons pas vu » en zoulou. Leur plus grand succès planétaire est « Scartterlings of Africa ». Le titre devient culte en Afrique du Sud et cartonne à la tête des hits parades dans certains pays africains, en France et en Grande Bretagne, pays d’origine de Johny. Tous le monde est ému de voir cet homme blanc sudafricain tellement en symbiose avec le peuple zoulou, en dépit des lois sociales en vigueur.
Sous l’Apartheid, ses musiques sont interdites. Il se produit avec son groupe dans des lieux publiques comme des universités, des églises, des foyers de personnes vulnérables ou chez des particuliers pour échapper à la vigilance des forces de l’ordre. En 1988, il organise une série de 3 concerts en Europe pour dénoncer le régime ségrégationniste et montrer qu’il prive le peuple sudafricain d’une union qu’il réclame.
Johny et les membres du groupe Juluka, gettey Images, 1992
Une réclamation légitime de cet artiste qui est devenu en Afrique du Sud le symbole de la lutte pour la liberté. « J’ai eu une carrière gratifiante à bien des égards (…) en réussissant à rassembler des gens grâce à des chansons, surtout à un moment où cela semblait complètement impossible », déclarait Johny Clegg au crépuscule de sa vie.
En 2015, les médecins lui diagnostiquent un cancer du pancréas. Il cesse toutes ses activités à cause de la maladie. Deux années plus tard, le chanteur profite d’un rétablissement prometteur et remonte sur les scènes pour un adieu mondial. Il entame une série de spectacles qu’il achève en 2018. Le 16 juillet 2019, il pousse son dernier soupir entouré des siens à Johannesburg.
La nation sudafricaine toute entière salue la mémoire d’un compatriote qui leur a appris à s’aimer dans la diversité. Hommes politiques, artistes, défenseurs des droits de l’homme, simples citoyens, tous ont exprimé leur respect pour le « zoulou blanc ». Le président du pays, Cyrille Ramaphosa a déclaré au sujet de l’artiste : « Johnny Clegg vivra toujours dans nos cœurs et dans nos foyers lorsque nous écouterons sa musique, mélange émouvant de célébration des cultures et de résistance politique ».
Mandela monte sur scène pendant un concert de Johny à Francfort, Olivier berg-Picture Alliance, 1997
Johny Clegg quitte la scène à 66 ans, mais laisse une empreinte indélébile dans la mémoire des sudafricains. Il est un enfant du monde qui a su vivre sa passion et en faire un canal pour atteindre un changement positif dans la société où il vivait. Il laisse à la musique sudafricaine un riche héritage aux couleurs de l’arc-en-ciel.